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Alain LETRUN

Syrie: la Vague Blanche ne peut voter blanc !

Le 15 March 2013
Tribune commentaires

Pour la première fois depuis le début de l’insurrection de populations de Syrie contre le régime dictatorial et effroyablement cruel des Assad, les Amiénois sont appelés à se rassembler pour signifier qu’ils ne restent pas indifférents aux souffrances de ce peuple. Il importe qu’ici, comme partout où ils auront lieu, ces rassemblements réunissent largement les personnes attachées aux valeurs démocratiques et à la défense des droits humains.

Cependant, le mot d’ordre officiel : «Stop aux massacres» et le refus de la part des organisateurs, d’apporter un soutien, ne serait-ce que moral, aux insurgés provoque trouble et malaise. Pourquoi une telle abstention ?

La tragédie politique que vivent les Syriens, et dont plus de 70.000 sont déjà morts, n’est pas une fatalité, l’expression d’une déplorable propension de certains humains à la violence guerrière.

Les soulèvements de mars 2010 à Deraa se produisent à l’occasion des obsèques de jeunes auteurs d’inscriptions murales hostiles au régime dont les corps mutilés viennent d’être rendus aux familles et alors que le cortège fait l’objet de tirs meurtriers des forces du régime.

Durant six mois, des dizaines de milliers de manifestants pacifiques seront ainsi, chaque semaine, pris pour cible. Peut-on alors reprocher la constitution de groupes d’auto-défense ? Face au refus obstiné du clan détenteur du pouvoir à envisager une issue démocratique, peut-on s’étonner de la création de groupes de combattants et de leur passage à l’offensive militaire ?

Certes, la pluralité des communautés au sein de la société syrienne peut nourrir des antagonismes, instrumentalisés par le groupe dirigeant pour assoir sa domination. Certes, le soutien qatari et saoudien à certains groupes de combattants fondamentalistes, l’infiltration de groupes djihadistes, ont généré de nouvelles exactions intolérables, mais est-ce une raison suffisante pour jeter l’opprobre sur l’ensemble du soulèvement et renvoyer dos à dos les camps en présence ?

Peut-on croire sérieusement, raisonnablement, que nier la réalité politique, fermer les yeux sur la nature du régime et passer sous silence sa responsabilité première et constamment perpétuée puisse, en quoi que ce soit contribuer à la recherche de la paix ? La paix est-elle concevable sans justice?


Le mot de la rédaction

Alain Letrun, président de l'Université populaire d'Amiens (UPA), se joindra en tant que simple citoyen au rassemblement qui se tiendra aujourd'hui à 19 heures, devant le monument aux Picards martyrs de la Résistance.

En tant que citoyen toujours, il nous explique son malaise face au «refus des organisateurs d'exprimer un soutien aux insurgés et le caractère abstraitement moralisateur du mot d'ordre retenu pour ce rassemblement "Non aux massacres" qui renvoie dos à dos les camps en présence sous prétexte "qu'il y a eu des massacres des deux côtés".»

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