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Réserve parlementaire: nos élus ne font pas de vague

Le 16 July 2013
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Par Mathieu Robert

Après une longue bataille judiciaire, un professeur de mathématique s'est vu remettre mercredi dernier, par le ministère de l'Intérieur, un fichier recensant les usages des réserves parlementaires versées en 2011 par les députés et sénateurs français. Une manne de 137 millions d'euros, selon Mediapart, destinée à financer les associations et collectivités.

La parution de cette liste permet de mieux comprendre comment est utilisé l'argent accordé aux élus de l'Assemblée nationale et du Sénat. (voir le ficher complet dans la Somme). Seul biais, cette liste ne comprend pas les subventions accordées aux associations.



Réserves parlementaires allouées aux collectivités locales dans la Somme (2011)


Dans la Somme, cela explique notamment pourquoi la liste fournie par le ministère ne recense que 5000 euros de dépenses en 2011 pour Olivier Jardé. Alors que l'ancien député Nouveau centre de la 2e circonscription assure qu'il disposait, durant son mandat de 2007 à 2012, d'une enveloppe globale annuelle d'environ 50 000 euros, qu'il consacrait en grande partie aux associations.

En 2011 dans la Somme, les parlementaires ont reversé un million d'euros de subventions aux collectivités locales (communes, communautés de communes, syndicats de communes...), dont 167719 euros destinés à la réfection des églises.

De simples députés

La parution de cette liste met en lumière le fonctionnement de l'attribution des réserves parlementaires en 2011, où les élus de la majorité sont mieux dotés que les collègues de l'opposition.

Par exemple, le député socialiste de l'époque Gilbert Mathon assure qu'il ne recevait chaque année qu'«environ 30 000 euros». Les députés centristes recevaient, eux, une enveloppe d'environs 50 000 euros. Par exemple, le député Stéphane Demilly a pu distribuer 56 000 euros en 2011.

Les députés UMP, Alain Gest et Jérôme Bignon ont été bien mieux lotis. Ils ont pu dépenser respectivement 118 000 et 116 000 euros en 2011, selon les comptes fournis par le ministère de l'Intérieur.

Chacun dans leurs partis respectifs, les députés de la Somme ont reçu des montants de base. Mais de plus grosses sommes sont allouées aux parlementaires qui exercent des fonctions particulières. Ainsi, le président du groupe UMP, Christian Jacob, pouvait distribuer 1,6 million d'euros ; le rapporteur général du Budget à l'Assemblée nationale Gilles Carrez (UMP) pouvait compter sur une manne de 3,85 millions d'euros de réserve parlementaire ; quant au président de la commission des finances, Jérôme Cahuzac (PS), il pouvait distribuer 1,2 million d'euros.

Tant et si bien que le député qui a le plus aidé les communes de la Somme n'est pas un député local. C'est Bernard Accoyer, alors président de l'Assemblée nationale, qui a reversé 120 500 euros aux collectivités du département. Une goutte d'eau pour Bernard Accoyer qui pouvait compter, en 2011, sur la coquette somme de 11,9 millions d'euros de réserve parlementaire.

La réserve parlementaire disparue de Maxime Gremetz

Dans la liste publiée, manque à l'appel le député de la 1ère circonscription de la Somme, Maxime Gremetz. L'élu apparenté communiste avait démissionné de ses fonctions en mai 2011. Seule trace de sa réserve parlementaire : un subvention accordée à la mairie communiste de Picquigny pour «la construction d'une aire de jeux au fossé de la ville et au lotissement La Garenne».

Mais cette somme ne semble pas avoir été versée par le député Gremetz lui-même. Sur la liste fournie par le ministère de l'Intérieur, la subvention provient du député PCF du Cher, Jean-Claude Sandrier. Le maire communiste de Picquigny, José Herbet, s'en étonne. Pour lui, c'est bien de la réserve parlementaire de Maxime Gremetz que provient la subvention. Il assure ne pas connaître le député du Cher, même de nom.

A Picquigny, la démission de Maxime Gremetz a laissé des traces. Le député aidait à la restauration de la Collégiale Saint-Martin, classée monument historique. Après la démission de Maxime Gremetz, sa réserve parlementaire ne pouvait plus être utilisée. Ce qui ressemblait à une mauvaise nouvelle a finalement fait le bonheur des habitants.

Dépourvu le maire s'est tourné vers un autre député du département, Olivier Jardé (Nouveau centre). Celui-ci a transmis sa demande au président de l'Assemblée nationale, Bernard Accoyer, qui aurait accordé au titre de la réserve parlementaire 2012, une subvention exceptionnelle de 50 000 euros.

Pas de gros écarts observés

La publication de l'utilisation des réserves parlementaires permet aussi aux citoyens de vérifier si les député-maires ou députés-conseillers généraux ne réservent pas les sommes qui leur sont allouées à des fins électoralistes.

On peut citer en France le cas du député-maire des Ardennes, Jean-Luc Warsmann, qui a attribué 630 000 euros de subventions à la commune de 1800 habitants dont il est maire. Dans la Somme, aucun dérapage de cet ordre n'a été constaté pour l'année 2011, contrairement à d'autres départements.

En revanche, on peut constater que Jérôme Bignon, député de la troisième circonscription de la Somme, par ailleurs conseiller général du canton de Oisemont depuis 1980, a particulièrement choyé son canton en 2011.

Le canton de Oisemont est l'un des plus importants de la circonscription avec 31 communes sur 184. C'est aussi celui qui a reçu le plus souvent des subsides de son député-conseiller général. Plus de quatre subventions sur dix et plus d'un quart des montants ont été attribuées aux communes de ce canton, alors qu'il ne représente qu'une commune sur six.

Le sénateur Pierre Martin a accordé quant à lui 31 500 euros pour des travaux de voirie dans la commune d'Hallecourt, 1400 habitants, dont il est maire.

Sénateurs, gros pourvoyeurs d'aides

Les plus grosses dotations de parlementaires sont à mettre au compte des sénateurs. En 2011, le parlementaire qui a le plus distribué de subventions dans le département est le sénateur centriste Daniel Dubois (170 000 euros), devant l'UMP Pierre Martin (120 000 euros).

Si la subvention des députés fait débat, celle des sénateurs encore plus. «C'est inadmissible», tranche l'ancien député PS, Gilbert Mathon, qui n'ose pas prononcer le mot «clientélisme». «Ils aident les communes et sont élus par les maires !»

Une accusation à laquelle échappe d'emblée le sénateur centriste Marcel Deneux (100 000 euros) qui utilise sa dotation pour l'équipement informatique des écoles du département. En 2011, dix écoles ont bénéficié de sa réserve parlementaire toujours à hauteur de 40 à 50% de l'investissement. Seule exception à cette règle, la réfection de la toiture de la mairie de Soyecourt.