Pas toujours facile d'avoir 15 ans. Le stade de la Licorne, inauguré en juillet 1999, voit peu à peu son état se dégrader. Fuites, rouille, verrière encrassée, la lumière n'entre plus dans le stade, qui perd de son sublime d'antan. Pas de quoi donc redonner le sourire aux supporters dans une saison plus que morne pour l'Amiens SC.
«Il n'y a qu'à lever la tête pour s'en apercevoir, tout est couvert de rouille», remarque un jardinier du stade. Le vieillissement de la structure métallique saute aux yeux en effet. Certains pointent du doigt une conception mal pensée et un stade trop difficile à entretenir, ou encore un mauvais choix de peinture, qui expliquerait la rouille précoce de la structure.
«Il n'y a qu'à lever la tête pour s'en apercevoir»
Et les premiers à pâtir du mauvais état du stade, ce sont bien sûr les supporters. «Les tribunes laissent à désirer et le stade est complètement rouillé. On le laisse à l'abandon c'est vraiment dommage», déplore Sébastien Crevisier, président du Kop des Licornes blanches.
Propos partagés par Dany Foré, président d'un autre groupe de supporters, l'AS Couton, visiblement excédé par le manque d'entretien du stade: «Ce n'est rien de le dire. On voit à l’œil nu une dégradation totale de l'édifice. C'est inadmissible d'avoir un si beau monument et de le laisser se dégrader ainsi. Le stade est de moins en moins agréable, et c'est tout de même étonnant que l'on ne réagisse que maintenant. C'est vraiment se foutre de la gueule des Amiénois».
Une conception mal pensée
Les causes de cette usure des installations sont à chercher dès 1997 lors de la construction du stade: l'édifice, il est vrai, est ambitieux et imposant. Et une telle structure demande évidemment un entretient constant. D'autant plus que les panneaux de verre choisis, bien qu’esthétiques, se révèlent très difficiles à entretenir, ce qui ne simplifie pas les choses.
De plus, une expertise datant de 2003 avait révélé des manquements dans la préparation de la charpente métallique: l'épaisseur de la peinture, censée protéger l'armature de la corrosion, s'est révélée insuffisante. Par ailleurs, il avait été constaté, et ce n'est pas une surprise, une importante condensation stagnant sur les pannes. L'environnement marécageux du quartier de Renancourt allié aux panneaux de verre mettent depuis longtemps les éléments métalliques à rude épreuve.
Pour rappel, un audit complet des équipements sportifs commandé par la Métropole avait mis au jour en avril dernier d'importants problèmes structurels affectant la charpente métallique du stade amiénois.
Les problèmes du stade de la Licorne sont donc connus depuis longtemps. Comment se fait-il que rien n'ai été mis en œuvre jusqu'à présent? En effet, il n'avait pas fallu beaucoup de temps pour se rendre compte des défauts de construction du stade de la Licorne, son altération s'étant rendue visible rapidement des procédures judiciaires ont été engagées contre les maîtres d’œuvre et les entreprises chargées des travaux dès la livraison du stade. Ces procédures expliquent que des travaux n'aient pas été planifiés auparavant, bien que des interventions ponctuelles aient été menées entre 2008 et 2010.
Une coquetterie à 7 millions d'euros
Le stade paye donc très cher ces défauts de construction. Aujourd'hui, il ne s'agit plus seulement de parer au mauvais état de l'édifice, c'est toute la structure qu'il faut revoir pour pérenniser le stade de la Licorne.
Des travaux ont d'ores et déjà été programmés, qui devront donner au stade une seconde jeunesse. La charpente se verra donc appliquer une peinture anti-corrosion qui devrait résoudre le problème de rouille. Mais la configuration de l'édifice complique la tâche et fait gonfler la facture.
On retrouve encore ici les causes et les conséquences des maux de la Licorne: la cohabitation du verre et métal, qui semble problématique. Car afin d'appliquer la peinture qui endiguerait la corrosion de la charpente, il faudrait démonter les panneaux de verre fixés aux poutres métalliques.
L’hypothèse préconisée actuellement est de remplacer les pannes tubulaires et de mettre en place une ossature galvanisée laquée pour écarter les pannes des panneaux de verre afin de faciliter l’entretien des vitrages et de la structure. L'ensemble des opérations s’élèverait à plus de 7 millions d'euros (hors remise en peinture) et s'échelonnerait sur plusieurs années.
Amiens métropole, en tant que propriétaire des infrastructures, devrait assumer seule cette dépense. Rien toutefois n’apparaît dans les autorisations de programme de la collectivité à ce jour. Le choix d'une intervention reviendra donc à la prochaine équipe métropolitaine en place.
La lumière n'entre plus dans le stade de la licorne.
Si des soins palliatifs sont prévus, la question reste posée à plus long terme. Il faut le rappeler, la Licorne est une jeunette. Et à voir son état après seulement 15 ans d'existence, on peut se demander combien de temps elle va tenir le coup. Faudra-t-il la maintenir sous perfusion et subventionner allègrement entretiens et réparations, se faisant de plus en plus lourds et fréquents à mesure que le stade prend de l'âge?
Lorsque le stade de la Licorne a été construit, l'Amiens SC était au sommet de son art, finaliste de la coupe de France, ratant d'un cheveu une montée en Ligue 1. Quinze ans plus tard, le club erre dans les bas-fonds de National (troisième division) et son stade est rongé par la rouille. Triste synchronie, fin d'une ère. Préfigurons qu'une seconde jeunesse est proche.
Je me suis rendu sur place le jeudi 20 mars afin de me rendre compte de l'état du stade et prendre des photos. J'ai ensuite contacté les différents intervenants par téléphone entre le jeudi 20 et le lundi 24 mars afin de recueillir leurs témoignages. L'essentiel des informations quant aux travaux à prévoir m'ont été fournies par les services de la Métropole.