Rue du marché Lanselles, les policiers se sentent à l'étroit.
Elle l'affirme: depuis le début de son mandat en 2008, Emilie Thérouin, adjointe au maire en charge de la sécurité et de la prévention des risques urbains, travaille activement à ce qu'un nouvel hôtel de police voit le jour.
En effet, construit en 1961, le commissariat rue du marché Lanselles est désormais obsolète. «Il était conçu pour accueillir 160 fonctionnaires, indique l'élue. Désormais, ils sont plusieurs centaines à y travailler. Près de 450. Ils sont les uns sur les autres. Dans les années 90, on a parlé de faire une extension au dessus de la partie des garages mais rien n'a été fait. Plusieurs préfets se sont succédé et ont plus ou moins apporté leur aide. Plusieurs lieux avaient pourtant été proposés, comme le boulevard Faidherbe ou la rue de la Vallée. Je trouve que les policiers ont vraiment du mérite de travailler dans de telles conditions.»
L'élue évoque aussi la vétusté du bâtiment. «Il n'est pas aux normes incendie et il n'est pas facile d'accès pour les personnes à mobilité réduite. Mais le plus déplorable à mon sens, est l'accueil des victimes. Les locaux ne permettent aucune confidentialité. Imaginez une personne qui vient porter plainte pour agression, si elle ne souhaite pas que tout le monde entende, elle est obligée de chuchoter. Elle peut très bien croiser, voire même être frôlée, par son agresseur. Il faut un lieu où les accueillir dignement.»
Disparition inquiétante des places de parking
Autre souci de taille: le stationnement. Autant pour les fonctionnaires de police que pour les habitants qui veulent se rendre au commissariat. La situation, qui en fait pester plus d'un, ne risque pas d'aller en s'améliorant avec la construction de la résidence place au Feurre. Une fois les travaux terminés, celle-ci logera une quarantaine de foyers. Or aucun parking souterrain n'a été construit.
Pour Émilie Thérouin, il est important et urgent de se battre pour qu'Amiens jouisse de l'accord du ministère de l'Intérieur pour l'obtention d'un nouveau commissariat. Toutefois, un tel projet ne se fait pas du jour au lendemain. D'une part pour une question d'emplacement mais aussi de financement.
«Un nouveau commissariat? Un doux rêve! déplore Bernard Kinn, secrétaire du syndicat Alliance police de la Somme. Le temps de trouver un emplacement, de faire les études, que le budget soit alloué et que les travaux soient effectués, il peut se passer plusieurs années. J'ai 53 ans et je suis certain de ne pas voir ce nouveau commissariat.»
Interrogé à son tour, Patrick Jacquemin, secrétaire régional délégué du syndicat de police Unité SGP police-FO, établit le même constat. «Depuis 1995, j'entends parler d'un nouveau commissariat. Je finis mes activités dans deux ans et je ne le verrai pas. Depuis des années, des études sont faites sur certains sites mais rien n’aboutit jamais. Rien de concret n'est fait. Un des emplacements proposés pour la construction d'un hôtel de police est le futur-ancien site de l'hôpital nord. Mais, même si il y a beaucoup d'espace, c'est trop excentré. De plus, les rues alentours sont très fréquentées et étroites. Les ambulances ont du mal à circuler.» Ce qui risque de compliquer les interventions d'urgence.
Avis que partage l'adjointe au maire. Selon Émilie Thérouin, le futur commissariat doit trouver sa place soit en centre ville, comme actuellement, soit en ceinture de boulevard. «À Beauvais a été construit il y a peu un commissariat en dehors du centre ville. Il est vraiment très bien. Les policiers ont de l'espace, ils ont également un centre de tir pour s'entraîner etc. mais, pour moi, ce n'est pas la solution.»
Mais alors où bâtir ce commissariat? Une des hypothèses semble plus lumineuse que les autres: la caserne de pompiers de la rue Jean-Catelas. En effet, des études ont démontré que son rôle était assez mineur. Il ne s'agirait pas de démolir le bâtiment déjà existant mais de le réhabiliter selon les normes et les besoins des fonctionnaires. «De plus, à cet endroit, il y a un très grand parking. Ce serait l'idéal», selon Émilie Thérouin.
Pour Patrick Jacquemin, cet endroit serait bien plus appréciable et opérationnel que le CHU Nord. Cependant, le fonctionnaire de police préfère ne pas s'emballer quant à la réalisation de ce projet. «Pour l'instant ce ne sont que des bruits. Bien sûr j'ai espoir que l'on ait un nouveau commissariat un jour car actuellement les conditions de travail sont vraiment très difficiles mais la réalisation d'un tel projet prend du temps».
Des locaux provisoires pour soulager
Dans l'intervalle, demande a été faite pour que soient annexés les locaux de l'ancienne Chambre régionale des comptes. Une réelle opportunité que l'élue compte défendre bec et ongles. Cette opération permettrait de soulager quelque peu l’hôtel de police et de faire en sorte que certains services soient moins éclatés aux quatre coins de la ville.
Toutefois il ne s'agira pas d'en rester là. Pour Émilie Thérouin, il faut que tout le monde œuvre de concert pour que le ministère de l'Intérieur choisisse d'investir les 13 millions d'euros nécessaires à la construction d'un commissariat. «Je pense bien sûr aux fonctionnaires, les policiers ainsi que le personnel administratif, mais surtout à l'accueil des victimes. Lorsque l'on vient porter plainte, c'est que l'on est en souffrance. Il faut un lieu où recevoir ces personnes dignement. C'est quasiment une question d'ordre moral. Il faut que le préfet soutienne le dossier. Ce sera aussi le rôle du futur maire d'Amiens de porter ce projet. J'ai veillé à ce que ce soit inscrit au programme de Thierry Bonté. C'est la mission du maire de se préoccuper de la sécurité des habitants.»
Le ministère de l'Intérieur ayant cependant récemment accordé un budget conséquent pour Beauvais, Emilie Thérouin redoute que la Picardie ne soit pas servie de si tôt. «Mais Amiens est tout de même la capitale régionale. Il me semble important de faire remonter le dossier au dessus de la pile.»