Près d'une centaine de caravanes sur Gervais-Leprêtre, selon les autorités.
La réaction de Daniel Parisot, maire de Boves, n'a pas tardé.
Dès le dimanche soir, il déposait une plainte conjointement avec la communauté urbaine: «occupation sans titre d'une installation d'Amiens métropole.» Ils ne sont pas passés inaperçus et n'ont pas réjoui les autorités, ces gens du voyage qui avaient, par effraction, transformé le terrain de foot de Boves en camping.
Aux yeux du maire et de la métropole, un stade, c'est plutôt une pelouse soigneusement entretenue, un système d'arrosage intégré et coûteux qui puise directement dans la nappe phréatique de Boves et, surtout, un cadre naturel fragile, à deux pas d'un site Natura 2000.
Conséquence immédiate de la plainte déposée, dès lundi, la police commençait à noter les plaques d'immatriculation des voyageurs présents sur le stade de Boves.
L'identification de chacun des tziganes est nécessaire pour pouvoir leur signifier leur expulsion. «C'est mon devoir de maire que d'exercer mon pouvoir de police», s'explique Daniel Parisot, conscient de marcher sur des œufs pour tous les sujets qui concernent les gens du voyage.
Il choisit ses mots: «Les gens du voyage sont des hommes et je les respecte en tant que tels, mais s'ils entrent par effraction, dégradent un équipement communautaire et stationnent illégalement sur le territoire de Boves, je me dois d'intervenir. Par ailleurs la population du village comprend mal qu'on les laisse s'installer. On me rapporte des nuisances, des jeux de pétanque après 23h sur la place du village ; on me fait part d'inquiétude. Il y a beaucoup de fantasmes autour de la présence de tziganes, il peut aussi y avoir des augmentations de la criminalité [la police rapporte que certains cambrioleurs attendent la présence de gens du voyage dans une zone géographique pour que leurs larcins soient attribués aux voyageurs, ndlr] Ces jours-ci les habitants ne me parlent que de cela quand ils me croisent dans la rue.»
Des tensions, des plaintes déposées pour un bivouac qui n'est voué à durer qu'une semaine, alors même que les gens du voyage ont la possibilité d'utiliser une aire dédiée aux grands rassemblements, juste de l'autre côté d'Amiens, au Nord. Le jeu en vaut-il la chandelle? Qu'est-ce qui a fait préférer l'illégalité à ces voyageurs?
Emplacements réservés à l'avance
Sur place, on peut chercher des réponses entre les caravanes de la communauté «Vie et lumière». Mais peu nombreux sont les tziganes désireux de s'exprimer.
Ils avouent suivre le pas des pasteurs qui les guident vers leurs grands rassemblements de l'été. Aire d'accueil ou stade de foot, ils ne décident pas vraiment. Quant aux deux pasteurs du groupe, MM. Lafleur et Lacroix, ils restent absents, invisibles ou injoignables, leur point de vue sur la procédure, la motivation de leur décision resteront inconnus.
Mais une réponse peut venir de l'Apremis. L'association «Accompagnement, prévention, réflexion et médiation pour l'insertion sociale» est chargée de gérer les aires d'accueil d'Amiens métropole. Réservation d'emplacements, accompagnement, insertion et orientation, cette structure est l'interlocuteur habituel des communautés désireuses d'utiliser les aires d'accueil.
Et Bruno Fruitier, un des responsables de cette association, l'assure : la communauté qui s'est installé fin juin à Boves avait réservé l'aire d'Amiens Nord, située au lieu-dit de la Vallée aux crapauds. Une aire dite «de grand passage» puisqu'elle est apte à accueillir deux cents caravanes pour de courts séjours.
Problème : conformément aux lois, cette aire est dotée d'une arrivée d'eau courante et d'un point de collecte des déchets, mais guère plus.
D'après Bruno Fruitier, les pasteurs de la communauté ont contacté ERDF dès leur arrivée sur l'aire de la vallée aux crapauds pour la mise en place d'un branchement électrique.
Un branchement forain qui, semble-t-il, n'a pas été possible. «Depuis huit ans les communautés qui viennent utilisent des blocs électrogènes, ça n'avait jamais posé de problème auparavant», déplore le responsable de l'Apremis.
Si les membres de l'association ont tout fait pour négocier avec cette communauté, le contact a été rompu par les tziganes après l'épisode d'ERDF. Et ces derniers ont jeté leur dévolu sur le stade Gervais-Leprêtre.
Négociation bloquée
La situation ne peut qu'agacer Daniel Parisot: «Les installations d'accueil d'Amiens métropole sont conformes aux lois, pourtant cette communauté de voyageurs aurait attendu plus que la loi actuelle. Mais par ailleurs ils entrent par effraction et transgressent la loi.» Faute d'avoir pu négocier leur départ, le maire de la ville leur a indiqué où trouver les conduites d'eau et l'électricité et a proposé d'utiliser les vestiaires de la salle de sport pour leurs stercoraires. Ou faire, contre mauvaise fortune, bon cœur.
Ironie de l'affaire : Boves a accepté une aire de grand passage sur son territoire : l'aire de Fort-Manoir. Située en bordure d'autoroute, accolée à la station d'épuration, on ne peut pas dire qu'elle est idéalement placée. Elle souffre d'une superficie trop limitée, une cinquantaine de places et Amiens métropole réfléchit à sa requalification en aire d'accueil pour longs séjours.
Bruno Fruitier, responsable de l'Apremis, prévient : cette année le grand rassemblement évangéliste du 15 août se déroule près de Laon, dans l'Aisne. Il est probable que la Métropole voie passer d'autres missions.